De Femmes à Genre dans le développement
Les différentes conférences qui ont marqué la décennie 1990 ont, à chaque fois, fait un pas en avant dans la théorisation des objectifs d'égalité entre les femmes et les hommes.
On peut citer la conférence internationale sur le statut des femmes de Mexico (1975), celle de Nairobi (1985) qui marque la naissance d’un « mouvement féministe mondial » ou encore celle de Pékin (1995) où l’on commence à accorder une grande importance au genre.
Les questions d'émancipation des femmes, d'empowerment, puis de genre sont donc officiellement devenues depuis les années 1990 des priorités internationales et l'« approche genre » est aujourd'hui associée à la question du développement et adoptée à toutes les échelles. Ce concept apparaît incontestablement comme un enjeu dans le champ de la solidarité internationale, de plus en plus intégré aux différents projets.
Si le terme de sexe a longtemps été employé pour faire référence à la différence biologique, celui de genre est communément employé depuis la Conférence de Pékin pour souligner une construction sociale des sexes autour de la définition des rôles masculins et féminins. Cette perspective permet de noter que les valeurs féminines sont globalement dévalorisées et les valeurs masculines globalement valorisées. Elle permet également de considérer le genre comme un invariant culturel, mais qui se décline spécifiquement dans chaque culture. Lorsque l’on parle de hiérarchie, l’on parle d’inégalités.
Les femmes représentent 51% de la population mondiale, 66% de la force de travail (dans le travail rémunéré et non rémunéré) ; elles sont responsables de 50% de la production de nourriture et perçoivent 10% des revenus tous secteurs confondus dans le monde. Elles représentent (Banque Mondiale 2014) 70% des travailleurs et travailleuses pauvres, et sont propriétaires dans le monde à hauteur de 1%. Les rapports de genre ont longtemps été un angle aveugle des projets dans les pays du nord comme dans ceux du sud et ce manque de conscience de la réalité a donné lieu à des échecs, voire à des conséquences négatives majeures.
Dans le contexte d’un projet, il est important de s’interroger sur la manière dont s’opère la division du travail –rémunéré et non rémunéré- entre les hommes et les femmes et d’observer toute l’organisation sociale qui s’articule au genre (les relations de castes, de classes, de générations, d’ethnicité, d’orientation sexuelle, etc). Le genre est donc central pour appréhender l’ensemble des inégalités.
Par Léna Ngouebeng, doctorante en sociologie, mène une recherche sur l'intégration du genre dans l'action humanitaire