C'est dans l'Etat de l'Arakan (ou Rakhine) que vivent la majorité des musulmans de Birmanie. Les Rohingyas musulmans constiueraient près d'un tiers de la population de cet Etat (du moins avant l'exode massif de la fin du mois d'août 2017). L'Arakan est réputé comme étant l'un des plus pauvres de Birmanie... mais il est pourtant riche en ressources naturelles et se trouve aujourd'hui au centre d'enjeux qui dépassent les populations qui y vivent.
Il suffit de jeter un œil aux cartes de la région pour comprendre à quel point la Birmanie et plus particulièrement les zones côtières, dans le Sud du pays, dont l'Arakan, occupent une place centrale dans les stratégies économiques, énergétiques et politiques des grandes puissances, à commencer par les deux géants voisins : l'Inde et la Chine.
Les ressources pétrolières et gazières découvertes dans la région, notamment au large de l'Etat de l'Arakan, à Shwe, attisent les convoitises et plusieurs projets de gazoduc et oléoduc sont déjà à l'œuvre.
Instrumentalisation de la situation des Rohingyas ?
A cette position stratégique, s'ajoutent une autre problématique, qui dépasse les enjeux régionaux : l'instrumentalisation des conflits religieux. Va-t-on vers une internationalisation de la crise des Rohingyas, qui « déborde » déjà des frontières régionales sud-asiatiques ? Y a-t-il un risque d'instrumentalisation de la situation par les organisations djihadistes ? Et quels intérêts servirait cette instrumentalisation ?
Sophie Boisseau du Rocher, chercheuse associée au Centre Asie de l'Institut français des relations internationales (IFRI), Didier Chaudet, consultant basé à Hong Kong, spécialisé sur les questions de sécurité en Asie du Sud, et Dominique Moïsi, conseiller spécial de l’Institut Montaigne, professeur au King’s College de Londres, en ont notamment débattu sur les ondes de France Culture.