Le règne de l'arbitraire
Les Etats européens entretiennent la distinction entre les réfugiés et les migrants (entendus comme les migrants économiques). En droit international, « réfugié » est le statut d’une personne qui a obtenu l’asile d’un Etat tiers, parce que dans son propre pays, elle craint « d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques » (Convention de Genève relative au statut des réfugiés).
Et un migrant ? « [Le terme] n’a pas de signification juridique particulière », rappelle Anicet Le Pors, ancien membre du Haut conseil à l’intégration. Dans le préambule de son rapport « Le recrutement des travailleurs immigrés : France 2017 », l’OCDE s’est inquiétée de la « confusion dans l’opinion publique » que risque de susciter le raccourci « fallacieux » qui consiste à opposer migrants économiques et réfugiés.
Mais surtout, comme le démontre Karen Akoka, maître de conférences en sciences politiques à l’université Paris Ouest Nanterre, sociologue spécialiste des questions d'asile, le statut de réfugié est une construction politique qui charrie son lot d’arbitraire.
Quand les politiques fabriquent de l'illégalité
Dans son premier sur l’immigration, le 27 juillet 2017, à Orléans, Emmanuel Macron déclarait :
L’ensemble de ce qu’on appelle affreusement les migrants aujourd’hui, ce ne sont pas tous des femmes et des hommes qui demandent l’asile, et qui viennent d’un pays où leur vie est menacée, il y en a beaucoup, et de plus en plus, qui viennent de pays sûrs, qui suivent les routes de migrations économiques, qui nourrissent les passeurs, le grand banditisme, parfois le terrorisme, et là, nous devons être rigoureux, et parfois intraitables.
Le temps d’un discours, les migrants passent du statut de victimes au statut de criminels « qui nourrissent les passeurs, le grand banditisme, parfois le terrorisme ». Pas sûr que de tels amalgames viennent calmer les réticences évoquées par Gérard Collomb et renforcer le droit d’asile.
Sans compter qu’en restreignant toujours davantage les voies légales d’immigration, le gouvernement français fait de l’asile dû aux réfugiés le seul recours possible pour les migrants. Une question lancinante se pose alors. Ne risque-t-il pas ainsi d'accentuer la pression sur cette procédure et de la rendre totalement inefficace ?