Pour empêcher les migrants de parvenir à ses frontières, l’Union européenne et ses membres ne font pas que soutenir le développement des pays de départ ou de transit. Ils vont jusqu’à leur confier le contrôle des flux migratoires. Cette logique dite d’externalisation semble imparable : moins de départs = moins de morts sur la route et moins d’arrivées. Vraiment imparable ?
Quels sont les objectifs poursuivis ?
Dépassée par l’ampleur de la tâche, l’Union européenne s’est engagée dans l’externalisation de sa politique migratoire. Elle sous-traite désormais à des pays tiers, qu’elle considère comme « sûrs », une partie de la gestion des questions migratoires comme l’accueil, l’asile ou encore le contrôle aux frontières.
Cette politique comprend deux mesures phares :
- L’ouverture de hotspots, des centres chargés d’examiner les demandes d’asile dans les pays d’origine ou de transit
- La signature d’accords de réadmission qui facilitent et donc augmentent les expulsions de personnes migrantes en situation irrégulière vers ces pays
Les Etats se targuent bien évidemment d’agir en accord avec les valeurs inscrites dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2000) : la dignité humaine, la liberté, l’égalité et la solidarité ainsi que les principes de la démocratie et de l’État de droit.
Dans son discours du 27 juillet 2017, Emmanuel Macron déclarait ainsi : « Nous créerons les voies et moyens de traiter les demandes d'asile sur le sol africain plus tôt, dans de meilleures conditions, pour éviter que des familles entières prennent des risques, parfois perdent la vie, pour une procédure qui leur est d'ores et déjà impossible d'atteindre. »
Des accords passés avec des régimes autoritaires
Les routes des migrations sont dangereuses, c’est un fait. Doit-on pour autant être rassuré quand l’Union européenne renvoie des migrants en Afghanistan, au Soudan ou en Libye ? Au regard de quels critères ont-ils été considérés comme des pays « sûrs » ?
La légitime indignation, consécutive à la révélation par CNN, le 14 novembre 2017, de l’existence de vente aux enchères de migrants en Libye, ne doit pas occulter le fait qu’à peine trois mois plus tôt, l’Union européenne avait signé un accord avec le gouvernement libyen pour lui confier une mission de contrôle des migrations. Fatou Bensouda, procureure de la Cour pénale internationale avait pourtant déjà lancé l’alerte : « Des milliers de migrants vulnérables dont des femmes et des enfants sont enfermés dans des centres de détention en Libye dans des conditions inhumaines. Des crimes et notamment des meurtres, des viols et des actes de torture sont présumés monnaie courante. »
Et que dire de l’accord signé avec la Turquie, qui sert désormais de matrice à la signature de nouveaux accords en Afrique ?
Des routes migratoires de plus en plus dangereuses
Le principal résultat de cette politique est surtout d’accroître le niveau de risques en obligeant les migrants à emprunter de nouvelles voix, toujours plus dangereuses, où les passeurs règnent en maître.