Les politiques migratoires sont une prérogative de l’Etat. Sauf qu’en gérant sans réelle concertation avec les territoires, leurs élus et leurs habitants, ce dernier crée les conditions du dysfonctionnement et prend le risque de générer voire d’exacerber les tensions. N’est-il pas temps de concevoir une politique associant l’ensemble des acteurs à la définition des réponses en termes d’accueil et d’hébergement ?
Les limites d'une politique par le haut
Les politiques migratoires et d’asile sont une compétence régalienne de l'État, qui doit prendre en charge l'hébergement, l'accompagnement administratif et social ainsi que les besoins en soins des demandeurs d'asile.
Ceux qui vivent et comprennent la réalité et les difficultés de l’accueil, ce sont évidemment les collectivités et leurs habitants, qui doivent in fine assumer les conséquences des décisions qui sont prises. Et le décalage est parfois énorme.
En octobre 2015, le Sénat publiait un rapport d’information « Les collectivités territoriales et l'accueil des réfugiés : crises et perspectives », qui pointait déjà les dysfonctionnements et le manque de concertation de cette politique :
Dialogue et coopération, ainsi que coproduction des solutions entre les services de l'État et les collectivités territoriales doivent être les maîtres mots […] Seule une répartition équilibrée et organisée des demandeurs d'asile permettra en effet la bonne acceptabilité […] de la politique d'accueil tant par les collectivités que par les populations.
En attendant que la situation se débloque, les collectivités, leurs élus et leurs habitants, notamment dans les villes où se concentre l’afflux de migrants, se mobilisent.
« On ne me laisse pas le choix », déclare ainsi Damien Carême, dans La Voix du Nord, 26 septembre 2017. Malgré l’opposition du ministre de l’Intérieur, le maire de Grande-Synthe (Nord) s’apprête ainsi à rouvrir un camp d’hébergement : « J’ai volontairement attendu cinq mois [mais] l’État [ne] trouve pas [de solution] ».
Même constat pour Giusi Nicolini, maire de Lampedusa (Italie) de 2012 à 2017, qui milite pour créer un réseau de maires de frontières :